Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

218 rue des pyrénées

Publié le par drink 75

 

Au 218 de la rue des pyrénées, le jour se couche déjà,  un homme qui vient de se lever, boit un peu de café pour essayer d'atténuer la gueule de bois de la veille, mais en fait il devrait boire un thé. Il se pose dans son canapé et regarde les feuilles qu'il a remplies au petit matin en rentrant, des paroles d'alcoolique. Le type est alcoolisé, les fautes d'orthographes sont alcoolisés, il se met a lire : "Nous sommes dans un état  difficile à décrire, les estomacs remplis d’alcools. Nous marchons dans le froid pour nous revigorer un peu. Pierre ne parle plus et je n’essaie même pas de tenir une conversation avec lui. Après une demi-heure de marche, mon état s’est un peu amélioré, pas beaucoup plus haut que le niveau de la mer mais je me sentais un petit peu mieux. Nous nous sommes arrêtés devant un bar qui semblait ouvert. Il se faisait déjà tard et ceux qui avaient commencé la soirée assez tôt brandissaient le drapeau blanc et rassemblaient de l’énergie pour parvenir à rentrer chez eux. Pour les noctambules, la soirée ne faisait que démarrer. Nous avons pénétré dans ce lieu ou il y avait de la lumière à défaut d’avoir de la vie. Tous les gens se regardaient comme si des tueurs de la mafia rôdaient dans le coin. Je compris immédiatement que ce n’était pas une bonne idée d’être venu ici. Je n’avais malheureusement pas le courage de repartir. Le portier nous a regardé comme si nous avions la lèpre et que nous allions lui refiler en nous approchant à moins de cinq mètres. J’ignore encore les raisons pour lesquelles il nous a laissé rentrer. Nous donnions sans doute l’impression d’avoir de l’argent. J’essayais de me souvenir comment était le quartier de la bastille quand j’étais jeune. Tous les cafés du coin étaient devenus comme celui-ci, des lumières tamisés pour faire intime, une musique hurlante à réveiller les morts pour être sûr que les clients ne somnolent pas, continuent de consommer et fassent tinter le tiroir-caisse, un portier pour donner l’impression que c’est un endroit chic réservé à une élite et des serveuses dont on veut nous donner l’impression qu’elles ont renoncé à une carrière de mannequin pour avoir l’insigne honneur de nous servir des cocktails aux couleurs criardes. Le lieu était fréquenté par des types habillés comme s’ils avaient à peine de quoi manger et qui brandissaient aux bouts de leurs doigts des clés sans doute pour montrer aux filles qu’ils avaient une voiture pour les raccompagner. Les filles avaient trop peu de personnalité pour que je puisse en dire quoi que ce soit. Je suis resté ainsi pendant plusieurs minutes à observer autour de moi. Nous étions accoudés au comptoir et je me suis dit que je boirais juste un petit verre. Nous avions un peu de route avant de rentrer à la maison et je savais qu’il faudrait prendre un taxi. Je me sentais déjà dans une autre dimension et j’avais l’impression qu’un nouveau verre me serait fatal. Je voulais m'en aller mais je voulais boire un verre. La musique était du domaine de l’insupportable. Je sirotais ma bière en regardant dans le vide, la serveuse derrière le bar me regardait d’un air sévère comme si le fait que je sois en face d’elle était déjà un crachat à sa face, encore une provinciale qui avait pété les plombs depuis qu'elle habitait à la capitale. C’était cela le nouveau Paris, tout le monde voulait faire son trou et pensait que le mépris était un marchepied. Pierre s’ennuyait prodigieusement, il n’y avait pas de filles auxquelles parler. "J'ai dragué des filles de ce genre mais ça sert à rien, dès qu'elles peuvent, elles te quittent pour sortir avec des futurs médecins ou des avocats." Bon en ce moment je suis en train de lire le dernier james lee burke alors j'y ai répondu par une citation de ce dernier. "Je déteste te dire ça, podna, mais certaines nanas ne sont pas différentes des mecs. Elles aiment baiser en dessous de leur condition et se marier au-dessus". Le pierre ça l'à scotché, je suis sûr que le style puisant et raffiné de burke ne l'a pas laissé indifférent. En fait non, c'est autre chose qui le tracassait. "Pourquoi tu m'appelle podna ?" J'ai pris l'accent du bayou de la nouvelle orleans (c'est entre popeye et alain bashung) "ben, c'est com'ça qu'on parle m'sié dans le bayou". Pierre à vidé la boisson bleue turquoise à 10 euros d'une seule lampée comme pour montrer qu'il avait les moyens. "J'ai toujours pensé que l'alcool allait te ravager le cerveau un jour ou l'autre il à dit, mais j'avais tort, en fait c'est la littérature qui aura ta peau". On reste à l'écart des choses pour éviter d'être foudroyé comme les autres. Les matins glacés me laissent hagards, mon esprit est comme déchiré par les sombres sentiments. Le temps s'arrête...Il faudrait courir, aller de l'avant comme si cela avait un sens...Mais où sont les effluves de bonheur, les errances sans alibi ? On reste là à désirer un éden mais le destin nous rattrape toujours...Nous n'aurons fait qu'un passage éclair sans mieux réussir que les autres...J’ouvre un œil. Je me trouve dans un nuage. Je suis mort et je me retrouve au paradis. Ce n’est pas une très bonne nouvelle. Est-ce qu’il y a un bar ? Vous imaginez le cauchemar ? Enfermé pour l’éternité dans un lieu où il n’y à rien à picoler ? C’est pousser les gens au suicide. Peut-on se suicider au paradis ? Et je voudrais réellement continuer ainsi, ne plus savoir ce que je suis, pourquoi je voudrais boire ou ne plus boire, pourquoi je voudrais vivre ou ne plus vivre, pourquoi je m’asphyxie dans l’alcool et je m’épuise dans l'insomnie. Je désire comprendre ce qui m’arrive mais c’est impossible si j’arrête de boire, j’aime la vaillance de notre désespoir, la perte de nos repères, et le sentiment que nous allons vers la déroute. Je ne sens pas une réelle gloriole a me maintenir dans cet état de complète déchéance, de destin qui part en piqué. Curieux ce sentiment d’immortalité, l’émotion qui affleure du zinc. Le ballon à moitié rempli de vin rouge, ce désir, ardent et brutal de vider le verre comme on rend les armes. Je sais la douleur de boire, de trop boire, de trop se laisser aller, de s’immerger dans la douleur. Boire est douloureux, trop de bonheurs, trop d’émotions, d’illusions, la vie qui se fane, comme en sommeil. On ne vît jamais la béatitude, on ne recommence rien, on s’émeut sur soi-même. On comprend son propre désir, sans maîtrise, trop de désir, trop d’envie. Pourquoi ne peut-on jamais s’arrêter de boire, on s’éprouve dans l’ivresse. Forcément, l’envie de boire, un besoin animal, comme le cochon à besoin de la boue, comme le mélomane de la musique. Forcément boire, je ne sais rien faire d’autre, je ne suis pas préparé à vivre, inapte au quotidien, incapable de gérer le moindre des éléments qui rythme les semaines et les mois. Boire permet de s’appesantir sur son malheur, se complaire dans l’indolence, continuer à ne rien faire pour que rien ne se passe. On s’essouffle ne plus courir, à ne plus se battre, on se fatigue à se laisser aller, à ne rien désirer, à ne plus vouloir. Baigné dans ce nuage, noyé dans une flaque d’eau, juste lever son verre et aligner les gorgées, continuer le rien et boire encore et toujours." Au 218 de la rue des pyrénées, l'homme pose les feuilles noircies, j'ai trop bu, il se dit, j'ai beaucoup trop bu.

Voir les commentaires

219 rue des pyrénées

Publié le par drink 75

Au 219 de la rue des pyrénées, dans l'immeuble qui jouxte le 221, un homme est assis, les yeux dans le vide, il pense a toute ses années, comme le quartier fut, il se souvient de ses jeunes années. La nostalgie le gagne, et il s'enfonce un peu plus dans son fauteuil dans l' appartement du 219 de la rue des pyrénées ou vit sa fille. Une jeune fille lit un livre de colas gutman dans la chambre de l'appartement du 219 de la rue des pyrénées ou elle vit avec ses parents, elle est allongée sur son lit, elle aime les livres de colas gutman, c'est de la littérature jeunesse mais ce n'est pas mièvre. Bientôt elle aura 10 ans, elle se demande comment ça fait d'avoir dix ans. L'homme assis dans son fauteuil, pense à la conversation qu'il a eu avec son médecin, il se demande quand donc les souvenirs vont s'effacer. Un jour il ne se souviendra plus de son enfance, de la rue vilin, un jour il ne se souviendra plus, du quartier de son enfance, de cette période ou ils ont tout rasés, du parc de belleville qui a tout recouvert. Un jour il ne se souviendra plus. L'enfant repose le livre. Ou est-ce qu'elle sera dans 10 ans, quand elle fêtera ses 20 ans. Et dans 20 ans, quand elle fêtera ses 30 ans. L'avenir la fascine. Elle aimera que le temps passe, grandir, partir de cette maison, vivre a l'abri du monde et lire tout les livres qui existent et qui paraissent. L'homme se lève de son fauteuil, il se dirige vers la chambre de sa petite fille. Il se demande pendant combien de temps il va se souvenir que c'est sa petite-fille en la voyant ? Il faudra qu'il s'occupe des papiers pour que son appartement de la rue de la mare soit la propriété de sa fille. Ainsi quand il mettra fin a ses jours, quand il sera devenu poussière dans une petite boîte sis au père lachaise, tout sera en ordre. On toque a la porte, et l'enfant dit entrer. Son grand-père lui sourit pourtant il semble ailleurs, un peu comme elle. On y va il demande. Il y a 10 minutes a pied pour aller a tenon, voir sa petite soeur qui vient de naître, voir sa mère qui vient d'accoucher. Voir connard de beau-père aussi. Elle sourit. Essaie de garder le sourire de ta petite-fille de 10 ans, il se dit, en lui disant de se préparer. Garde le sourire de l'enfant jusqu'a la fin. Ou presque.

Voir les commentaires

220 Rue des pyrénées

Publié le par drink 75

 

Au 220 de la rue des pyrénées, un homme est assis a son bureau devant son ordinateur,  l'homme essaie de travailler sur un livre, qui serait un panorama du rock français de la fin des années 80 et du début 90. C'est encore en projet et il sait bien qu'il ne trouvera aucun éditeur pour lui faire une avance et le journal pour lequel il travaille ne voudra pas publier un pensum aussi long. C'est la veille alors qu'il errait au 104, ce lieu totalement hallucinant, ou il se sent toujours un peu ailleurs, comme dans une sorte de lieu de recueillement, une cathédrale d'un autre temps, au 104 donc, alors qu'il traînait un peu au merle moqueur pour regarder les nouveaux livres qui sortaient, son regard était resté plusieurs minutes sur le  programme a venir du 104 qui était scotché un peu partout. Il était indiqué qu'au cours de la saison, claire diterzi donnait un spectacle. Diterzi et julie bonnie avec trois autres types dont j'avais un peu oublié les noms, avait formé un groupe les plus fascinants de la fin des années 80 début 90. Forget mi notte. Il avait le tee-shirt avec une corde a linge ou reposait des sous vêtements masculins. Forget mi notte venaient de tours, c'est fou a l'époque mais un paquet de groupe venaient de la région, élargi certes, forget mi notte, un des meilleurs groupes en concert de cette époque. il n'avait jamais accroché avec claire dit terzi, lui il était amoureux de julie bonnie, plus tard elle formera cornu avec les garçons de forget, et puis elle deviendra sage femme, et écrira des bouquins, le premier avait eu pas mal de succès, ça ne l'avait pas beaucoup intéressé. Il se souvenait d'un des derniers concerts du groupe, ou l'on sentait que les deux filles étaient proches de se foutre sur la gueule. Il semble se rappeler qu'un des percus de forget mi notte avait formé un groupe avec le batteur de portobello, kpitain kavern ça s'appelait mais il n'était pas très sur. Portobello bones c'était vraiment le groupe de cette époque, eux aussi de tours, le premier album "nu" un de ceux qu'il avait le plus écouté a l'époque, et puis portobello amigos, un album avec plein de reprise joués avec d'autres groupes. C'était la grande époque du festival aucard de tours. Il avait croisé souvent le chanteur de portello bones, l'avait hébergé a bruxelles,  il était devenu tatoueur, mais il lui semble qu'il avait rejoué dans un groupe avec une fille, copenhagen, un nom dans le genre, l'ancien bassiste était parti jouer avec avec les no one is innocent, il avait dormi chez lui une fois a tours, sans que le gars se trouve la d'ailleurs. Le batteur des portobellos avaient joués avec les seven hate de poitiers pour leur dernière tournée en remplacement du chanteur batteur qui n'arrivait plus a tenir les deux rôles. Les seven hate s'étaient reformés il y a quelques temps mais il les avait raté. Il adorait seven hate, penser a reécouter leurs vinyls. Il avait hébergé les seven hate a paris et ils avaient fait le forcing pour regarder téléfoot le dimanche matin. C'était quoi leur bled déjàa, chasseneuil du poitou. A l'époque les papes du rock français étaient bien surs les thugs d'angers, il y a avait un autre groupe aussi d'angers, casbah club il lui semble. Et puis bien sur, les spicy box de saumur. Un des plus gros chocs sur scène qu'il ait jamais ressenti. Les spicy box, il se souvient bien, comme il s'était battu pour les faire tourner, pour qu'ils perçent, ils avaient obtenu un passage a nulle part ailleurs en live. A la même époque que les burning heads d'orléans.  Baffie était devenu sourd. Les burning qui tournaient encore pour leur 30 ans de carrière. Penser a tout ces groupes, bordel la nostalgie qu'il ressentait. Tout a coup il se souvenait des tongz de tours, il était sur de les avoir vu, de les avoir fait jouer, il était pote avec leur manager. Les tongz, c'était du flycore, il lui semblait. Bordel se dit le gars assis a son bureau devant son ordinateur dans son appartement du 220 de la rue des pyrénées, c'était quoi déjà du flycore ?

Voir les commentaires

221 Rue des pyrénées

Publié le par drink 75

 

Au 221 de la rue des pyrénées, un homme assis a son table, prend un stylo et voici ce qu'il rédige : "Couloir d'hôpital. Je me souviens. Je me suis dit peut-être que John Fante est mort là 5 ans auparavant. Sans jambes. Sous sol. Lumière crue. Ça pue le cadavre et la javel. Ton père. Je peux plus avancer. Il s'assoit sur un banc. Le black s'assoit près de lui. Lui parle doucement. Moustachu m'embarque, il ignore pourquoi mais je semble sans réaction. Anesthésie. On rentre. Personne. Le vide. On soulève un drap. C'est lui. Il sourit. Connard man sourit. C'est mon frère je dis. Moustache donne prénom et nom. J'acquiesce. Date et lieu de naissance. Surdose. Flic et médecin qui me scrutent. Cherchent des traces de drogues dans mes pupilles. Regardent mes bras. Frère de camé. Couloir. Mon père boit un verre d'eau. C'est lui je dis. Fini. Il a repris le dessus. Tu vas prévenir tes sœurs et ta mère il me dit. Ce sera mieux. Tu trouveras les mots. Tu es doué pour ça. Je le regarde. Sa lâcheté me fait de la peine mais il a sans doute raison. Ça passera mieux. Mes sœurs et ma mère ne parlent plus à mon père depuis des années. Il dit j'ai perdu mon fils. Comme il dira plus tard, je vais retrouver mon fils. Je ne pense rien. Son fils. Ton fils. Les flics nous ramènent. Toujours nuit. Un peu frais. Je m'assois sur le canapé. J'attrape le téléphone. Mon frère est mort je pense. Mon putain de connard de frère est mort. Je regarde le téléphone. Va falloir le décrocher. Putain de téléphone. La cité des anges. Tu parles. Rarement vu un nom qui colle aussi mal à une ville. Le cauchemar climatisé. C'est henry miller qui avait raison. J'ai mes doc aux pieds. Ambiance de la fin des années 80. J'ai un peu plus de 18 ans presque 20. Deux jours que je suis là et déjà "I love L.A" de Randy Newman cinquante fois par jour à la radio, je ne peux plus. Une heure de retard, je comprends rien aux directions dans cette ville. T'es tout content de trouver la bonne rue sauf que la rue elle fait 20 bornes de long. Mon frère m'attend, pantalon en cuir bill tornade, chemise branchée. Gueule de con. Une fille à chaque bras. Blondes, gaufrées, cheveux en pétard, fringues flashy. On dirait des figurantes de desesperately seeking susan. Putain, il gueule, une plombe que j'attends, t'as aucun putain de sens de l'orientation. Sait pas dire grand chose à part putain ce connard. Présentations. Sheila et Tori. Je vous présente mon petit frère. Squirrell. Je prends le volant dit mon frère, tu m'en veux pas, mais je voudrais arriver avant demain matin. Moue de la fille à côté de moi à l'arrière. Rires des connasses. Squirell c'est un prénom me demande t'elle en anglais. Bien sûr dit mon frère. Squirell. Pauvre connard. Tout ça en anglais. Pour que les deux greluches comprennent son humour foireux. Direction Pasadena. Tu as de la chance me dit la fille à côté de moi, Sheila ou Tori je sais plus, tout le monde adore ton frère. Il est génial. Tu m'étonnes je réponds en français. Elle comprend rien. Plus tard à la station service. Je fais le plein, mon frère me tend deux billets de 20 dollars. Tu prends quelques bières il dit. Et puis il me reprend les billets et se tape sur le front. Mais putaiiiin, j'avais oublié que t'as pas tes putains de 21 ans, tu peux pas acheter de bières. Les filles qui rigolent. Il a raison ce connard. Faut avoir 21 ans pour acheter de l'alcool ici. Une des greluches qui se met à faire de l'humour. Hey les gars achetez aussi des escargots. Ah ah, dit mon frère des putains d'escargot hein, mon frère est un putain de mangeur d'escargot, hein squirrell, et de grenouilles aussi. A la caisse pendant qu'on fait la queue, il m'attrape la joue et la serre entre le pouce et le majeur. Enculé. C'est cool là où on va, mais si je te voie prendre de la coke ou du crack tu es dans l'avion dès demain matin pour paris. Connard je pense, Crève. Plus tard la baraque. Piscine. 'tain on se croirait dans less than zero. Qu'est-ce que je fous là. Je me pinte la gueule. Facile avec cette chaleur, une bière et tu pars en piqué. On est chez une des filles. Alors ton frère aussi il est français ? demande un type aux cheveux en brosse à mon frère. Ben non, putain, qu'est ce tu crois, tu vois bien que c'est un putain de chicanos ! Tout le monde qui rigole. Le type qui me demande. Alors toi aussi, tu es comme tous les français tu aimes bien Jerry Lewis ? Plus tard, je m'endors dans un vieux canapé. Je me réveille. Fait nuit. En sueur. Mal au crâne. Des rires en haut. Grande gueule de connard de frère qui ramène sa fraise. Je sors dehors. Il fait frais. Une fille assise au bord de la piscine, les genoux ramenés sous son menton. Elle est un peu ronde, on dirait siouxsie. Habillée en noire, très maquillée. Une radio à côté d'elle crachote du cure. L'album pornography. Je sens qu'on va se marrer. Je m'assois à côté d'elle. Chouette soirée hein je dis. Elle me regarde. T'as un putain d'accent, mais tu t'appelles pas squirell hein, et ton frère est un putain de connard. Putain oui je réponds. Dans 2 mois il sera mort. Chaleur écrasante. Limite insolation. Venice. Terrasse. Connard de frère avec une fille. La fille là, Carol. Alors elle me demande ce que j'ai fait ces derniers jours. Elle est pas avec toi Morticia me demande mon frère. Je fais la gueule. Je fais tout le temps la gueule. J'ai pas cette légèreté de maintenant. April je réponds. Elle s'appelle April. Vous êtes vraiment des putains de crétins de donner des putains de prénoms qui sont aussi des mois du calendrier dit mon frère à Carol. T'imagines si mon frère s'appelait décembre. Putain ce connard est né à Noël. On a eu nos cadeaux en retard une année à noël parce que le putain de chiard voulait pas sortir de ma mère. Enfant gâté. Je suis canadienne répond Carol pas américaine. C'est pareil dit mon frère. Pupilles dilatées. Héroïne. Je crâne avec Carol je fais le malin. Je suis allé sur Big Sur hier, je dis, je voulais voir où avait vécu henry miller. Frérot qui hausse un sourcil. J'apprécie ce moment. Lui je sais pas. Carol qui soulève a fourchette. Ah oui, henry miller, le dernier mari de Marylin Monroe. Voilà je réponds. Œil de mon frère qui pétille. Communion de quelques secondes. Ça ne va pas durer. Ce connard me déteste autant que je le déteste. Pas pour les mêmes raisons. C'est quoi le prochain pèlerinage me demande mon frère, tu vas aller aux  champs de courses de la San Fernando valley voir si tu trouve Hank ? On dit qu'il y est  tous les jours. Essaie de ramener une photo de toi avec Bukowsky, tu vas impressionner toutes les zombies habillés en cadavres qu'écoutent la même musique de mort-vivants à Paris. Fourchette de Carol. Bukowsky ? Un putain de polak qui a joué au base-ball non ? Mon frère qui rigole. Moi interloqué. Connard. Juste me montrer qu'il a aussi de la culture. Il n'est pas comme tous ces gens qu'il fréquente. Trop de bruits à Venice. Trop de tout. De rollers, de culturistes, de filles babas cool. Trop d'énergie. Trop chaud. Gauche-droite. Carol. Mon frère. Hey dit mon frère, on va à Santa Barbara ce week-end ? On restera deux ou trois jours. Profite mon gars. Profite connard. Il t'en reste moins de 60 à vivre. Des jours. 30 Août 1990. Défonce à tous les étages, défonce à tous les naseaux et les nazes en premier. Pas encore les cauchemars, les cygnes crucifiés dans le Yorkshire, ni Laura Dern un couteau dans le cœur sur Hollywood boulevard. Pas encore les bras à la recherche des corps ni les hurlements dans la nuit. Août 90, il ne reste rien, des tonnes de poudre et des lignes sans fin sur le carrelage de la cuisine, et puis des corps de filles aux visages angéliques et crétins et du vomi sur la cuvette des chiottes. 30 août 90, le farmer’s market au matin, enfin à l’aube pour nous, à midi pour les autres, la sueur sous le soleil brûlant, la sueur sous la coke, un pied dans la tombe. Août 90. Rêves et cauchemars. La mort de connard, de frère connard. Le visage incrédule de mon père je sais que ça n’arrivera pas. La voix de ma mère au téléphone, je savais que ça finirait comme ça. Août 90, April qui n’avait rien à dire, mais déjà chez ces gens-là, une propension à remplacer la conversation par j’ai des tatouages et j’ai des piercings tu veux les voir? Août 90, l’entrée dans la vie d’adulte. 30 Août 90, game over. Un drap qui se soulève. Avant tout le reste. Avant j’étais dora suarez, avant la bouillie de sentiments fracassés. Comment s’appelaient-ils? Comment s’appelaient-elles? Et Randy Newman tous les matins dans le poste de radio. I love L.A. 30 Août 90, une soirée comme une autre, une défonce comme les autres. Un couloir sans fin, une vie sans fond. Août 90 c’est la fin d’une histoire, c’est la meute qui se disperse quand ce flic moustachu soulève le drap. C’est des couloirs sans fin, c’est l’aube pas radieuse sur la ville déjà speed. I hate L.A. Toutes ces filles les jours suivants qui se jettent dans mes bras en pleurant, et leurs seuls mots de français, oh ton frère ! quoi mon frère? Il est mort et c’était un connard. 30 Août 90. Tu te souviens, tu n’y étais pas. Les derniers pas sur le goudron brûlant. Et puis c’est tout. Couloir sans fin. Flic. Moustache. Drap. Père qui pleure. Mère qui hurle. Téléphone. Et puis ça recommence. Une dernière ligne. Sans se retourner." L'homme pose son stylo au 221 de la rue des pyrénées. Il faut qu'il relise.

Voir les commentaires