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103 rue des pyrénées

Publié le par drink 75

 

Le 103 de la rue des pyrénées, c'est le berbère café, ou le berbère rock café. Ca dépend des gens. En fait je crois que pour la majorité des gens c'est le berbère rock. Un  type sirote un café au comptoir du berbère rock, il se demande si c'est autorisé. Ce n'est pas bon pour sa santé le café se dit-il mais est-ce que vivre est bon pour la santé, se demande t'il en rigolant intérieurement. Quand on sait que tout est fini, on commence a se repasser le film de sa vie. C'est curieux depuis quelques temps, il a l'impression de revivre des scènes de son enfance, il voit sa mère, son père, des images qu'il pensait disparu. Bordel, se dit il, en plus de ne plus picoler, voila qu'en vieillissant on devenait sentimental.  Devant le 103 de la rue des pyrénées, à l'angle avec le passage dagorno, devant le rade un peu miteux, une femme attends son uber. Le manteau couvre ses formes, sa jupe un peu courte, son bustier qui met ses seins en évidence. Elle se demande ce que fout le uber, elle n'aime pas attendre sur le trottoir alors qu'elle est habillée pour un rencard. Elle est pourtant détendu car elle connait le client. Elle a déjà couché avec lui 2 fois. Elle n'a pas la même appréhension que lorsque c'est un client inconnu. Payer ses études. Elle se demande si elle y croit encore. Pourra t'elle vraiment revenir a sa petite vie d'étudiante maintenant qu'elle touche beaucoup d'argent, dors dans des draps en soie, dîne dans des restaurants étoilés. Est-ce qu'elle pourra revenir un jour a sa petite vie d'étudiante fauchée ? Au 103 de la rue des pyrénées assis a une table du berbère café, un homme regarde a travers la vitre, le mouvement de la rue. Il assèche sa bière et en demande une autre d'un petit signe au patron. Il se sent seul. Coucher avec deux filles, entretenir une vraie relation avec deux femmes différentes, ce n'était pas la meilleure des idées. Il a perdu les deux en même temps. Il se demande les raisons qui font qu'il n'a jamais fait de choix dans sa vie, pourquoi il a papillonné entre les femmes, les boulots, les villes. Sans réellement choisir. Il est normal de se retrouver seul à l'aube de la vieillsse. La fin du parcours n'attire pas les femmes. Lui même n'est pas très attiré par ce qui l'attends, lui même n'est pas très attiré par ce qu'il va devenir.  Enfin ne rien devenir.

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104 rue des pyrénées

Publié le par drink 75

Je t'ai vu au 104 de la rue des pyrénées, j'ai pensé que ce n'était pas la peine de te héler, de crier ton nom, j'ai pensé que ce n'était pas la peine. J'écoutais une chanson de marc seberg qui dit "sans toi toutes les couleurs se fanent, en une fine pellicule de poussière un peu sale". J'ai regardé ton corps disparaître, a moins, que ce ne soit ton âme, et je me suis demandé si tu savais que philippe pascal était mort. J'ai cru ne pas te voir au 104 de la rue des pyrénées, je me suis demandé si je ne devenais pas un peu dingue, a moins que je ne le sois déjà. J'écoutais une chanson de marc seberg qui dit "elle se dérobe une fois encore, puis se dérobe, ivre d'éther". Je n'ai pas vu ton corps qui dansait dans la rue, car je crois que c'était une vie de songe, une illusion de songe. Et puis j'ai attendu que les couleurs vacillent et que tout ne revienne comme avant. Je crois t'avoir vu au 104 de la rue des pyrénées, j'étais dans le 26 qui descend vers la nation et j'écoutais une chanson de marc seberg qui dit "et quelqu'un reprendra cette chanson pour toi avec des mots plus forts, avec des mots plus justes" et je me suis demandé pourquoi tu étais devant le 104 de la rue des pyrénées. Tu savais bien que j'habitais beaucoup plus haut dans la rue. Vers belleville ménilmontant. J'ai pensé descendre du bus pour te parler. Et puis le bus est reparti et le 104 de la rue des pyrénées a disparu de mon champ visuel. Et toi aussi. Surtout toi.

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105 rue des pyrénées

Publié le par drink 75

 

Au 105 de la rue des pyrénées, dans le bel immeuble qui se trouve un peu avant le berbère café, un homme sirote un whisky et se demande ce qu'on dit a une personne que l'on a pas vu depuis 30 ans ?  Il finit son verre de jack daniel's et pense que déjà il ne sait pas quoi dire a quelqu'un qu'il n'a pas vu de puis un an ou deux. Alors depuis 30 ans  ? On dit tiens salut quoi de neuf depuis 30 ans ? Et puis il apprend que philippe pascal est mort. Et tout revient. Rennes. L'ubu. La place des lices. Les trans. La salle de la cité. Les années 80. Dominic sonic. L'hiver. Dol de bretagne. Le train de nuit. La rue st michel. Kalashnikov. Ceux des années 80 étaient en train de tomber. Laurent sinclair. Tous. Y passer. Au 105 de la rue des pyrénées, un homme boit une bière. Philippe pascal est mort. Un de moins. Un de plus. La fin est proche.

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106 rue des pyrénées

Publié le par drink 75

 

Au 106 de la rue des pyrénées, dans son appartement du troisième étage relit des textes qu'il a écrit il y a des années. C'est un peu pathétique, ces écrits vieillots. Il lit un extrait a haute voix : Chaleur écrasante. Limite insolation. Venice. Terrasse. Connard de frère avec une fille. La fille là, Carol. Alors elle me demande ce que j'ai fait ces derniers jours. Elle est pas avec toi Morticia me demande mon frère. Je fais la gueule. Je fais tout le temps la gueule. J'ai pas cette légèreté de maintenant. April je réponds. Elle s'appelle April. Vous êtes vraiment des putains de crétins de donner des putains de prénoms qui sont aussi des mois du calendrier dit mon frère à Carol. T'imagines si mon frère s'appelait décembre. Putain ce connard est né à Noël. On a eu nos cadeaux en retard une année à noël parce que le putain de chiard voulait pas sortir de ma mère. Enfant gâté. Je suis canadienne répond Carol pas américaine. C'est pareil dit mon frère. Pupilles dilatées. Héroïne. Je crâne avec Carol je fais le malin. Je suis allé sur  Big Sur hier, je dis, je voulais voir où avait vécu henry miller. Frérot qui hausse un sourcil. J'apprécie ce moment. Lui je sais pas. Carol qui soulève a fourchette. Ah oui, henry miller, le dernier mari de Marylin Monroe. Voilà je réponds. Œil de mon frère qui pétille. Communion de quelques secondes. Ça ne va pas durer. Ce connard me déteste autant que je le déteste. Pas pour les mêmes raisons. C'est quoi le prochain pèlerinage me demande mon frère, tu vas aller aux  champs de courses de la San Fernando valley voir si tu trouve Hank ? On dit qu'il y est  tous les jours. Essaie de ramener une photo de toi avec Bukowsky, tu vas impressionner toutes les zombies habillés en cadavres qu'écoutent la même musique de mort-vivants à Paris. Fourchette de Carol. Bukowsky ? Un putain de polak qui a joué au base-ball non ? Mon frère qui rigole. Moi interloqué. Connard. Juste me montrer qu'il a aussi de la culture. Il n'est pas comme tous ces gens qu'il fréquente. Trop de bruits à Venice. Trop de tout. De rollers, de culturistes, de filles babas cool. Trop d'énergie. Trop chaud. Gauche-droite. Carol. Mon frère. Hey dit mon frère, on va à Santa Barbara ce week-end  ? On restera deux ou trois jours. Profite mon gars. Profite connard. Il t'en reste moins de 60 à vivre. Des jours. Il boit une gorgée de sa bière, puis il lit a haute voix un second extrait : " Je ne suis pas un alcoolique, j’en ai la conviction. Elle m’est venue le lendemain d’une de ces cuites mémorables - de celles où l’on boit tellement que ce n’est plus du sang qui coule dans vos veines mais un liquide en fusion qui s’apparente à de l’alcool- alors que je ressentais quelques douleurs au foie, au crâne, et dans tout ce que le corps peut posséder comme articulations. J’ai pris la décision que je ne vivrai pas pour l’alcool mais avec lui. C’est une simple question d’interprétation me direz-vous et je me demande parfois si ce n’est pas un comportement un peu naïf. Je suis lâche, je suis incapable d’arrêter de boire de façon définitive mais j’ai tout de même l’impression de contrôler la situation. Je n’aime pas boire pour boire, l’hébétude ne m’apporte rien, mais la boisson m’aide à me socialiser et j’aime l’ivresse par-dessus tout. J’aime à ingurgiter des alcools différents, des liquides au goût ocre et doux, fort ou saumâtre, amer ou sucré. J’aime la langueur qui vous envahit petit à petit, le vaste monde qui s’ouvre à vous. J’apprécie l’idée d’une communion entre plusieurs personnes qui partent ensemble vers des contrées sauvages, sans espoir de retour. J’aime cette idée que ça ne sert à rien, que c’est vain, je crois que nous sommes des conquérants de l’inutile. Il paraît saugrenu de faire passer l’idée d’une sensualité de la bouteille à quiconque vît un jour un régiment de militaires repus de bières ou une équipe de footballeur au comptoir d’un bistrot. Mais il peut arriver parfois qu’une certaine chaleur allume le zinc. J’aime boire dignement même si je le reste rarement. J’essaie toujours garder une petite lumière allumée pour parvenir à rentrer au port les soirs de tempête, mais parfois il y à trop de brouillard, et je m’échoue lamentablement sur les rochers. J’aime boire pour  l’inconnu, pour le courage que cela donne, pour cette impression d’éternité que donne l’ivresse. J’aime les alcools qui vous tapent sur la tête, ceux qui sont traîtres et qui l’air de rien vous scie les pattes au moment où vous vous y attendez le moins.  J’aime les digestifs, les alcools de prune, le cognac et sa palette de saveur, j’aime les whiskys, la bière, j’aime tout ce qui se boit...Je ne pourrais dire comment l’alcool m’est venu, je ne me souviens pas trop de tous les détails, je ne sais plus qui a fait le premier pas. Je crois bien que nous nous sommes habitués l’un à l’autre, petit à petit. Je ne suis pas persuadé comme les bons esprits que l’alcool soit un supplétif à l’ennui, parfois c’est vrai on picole pour passer le temps, mais ce n’est qu’un détail. On boit pour devenir un autre, pour être plus fort, pour parler, pour rire et pleurer. Le seul problème est de tenir la distance, mais je ne pense pas  que boire soit plus crétin que rester toute la journée assis devant la télé. Je ne pourrais expliquer. C’est un monde à l’agonie celui des alcooliques, nous sommes entrés dans une autre dimension, celui des drogues fortes, des petites pilules  qui vous injectent la folie et vous rendent amoureux. Ce n’est pas assez virtuel l’alcool. C’est comme si maintenant tout devait aller plus vite, qu’on ne pouvait plus se laisser prendre par l’ivresse. Les gens ne veulent plus rester des heures au comptoir des bistrots, à attendre, ils veulent que tout aille très vite, ne s’arrête pas, c’est comme si on ne pouvait plus se laisser prendre par surprise mais qu’on devait péter les plombs immédiatement. Les cafés sont en train de mourir à Paris, un peu comme la ville, il y encore  des îlots de résistance mais pour combien de temps ? C’est plus une ville, tout est fonctionnel, rationnel, brillant et sans saveur. La ville est morte avec ses bars. Encore une gorgée de bière puis il reprends la lecture d'un nouvel extrait, toujours a haute voix. "Je me suis faite violée de l’autre côté de la seine, dans le douzième arrondissement. Je rejoignais le treizième par le nouveau quartier de Bercy et c’est en longeant le nouveau jardin que j’ai croisé ces types. Je suis toujours sur mon banc, je ne ressens plus les effets de l’alcool. Je suis saisie par la terreur. Je réussis à me lever du banc, il y a encore quelques personnes qui sortent des cafés qui ferment, j’arrive à rejoindre la rue Bobillot. Je me rends à la fontaine qui se trouve devant la piscine et je m’asperge d’eau. Je vois la place d’Italie au loin, à quelques centaines de mètres de là. Un groupe d’une dizaine de personnes bruyantes et heureuses semblent se diriger vers la place. Je les suis et je parcours les quelques dizaines de mètres   relativement rassérénée. Voilà je suis place d'Italie mais c’est le maximum que je pourrais parcourir. Je n’ai pas la force rentrer chez moi. A côté du centre commercial, il y a une résidence hôtelière. Je réserve une chambre pour la nuit en insérant ma carte de crédit dans une borne automatique. C’est parfait de ne pas avoir à parler à quelqu’un, juste un automate rationnel qui se contrefiche de savoir pourquoi vous désirez réserver une chambre à une heure pareille et qui ne remarque pas que vous avez bu, que vous ne possédez pas de bagages et que les larmes coulent sur vos joues.  Je m’écroule sur le lit après avoir allumé la télé. Je ne supporte pas le silence. Je laisse la télé sur une chaîne d’information où les présentateurs  jactent sans discontinuer. Je pleure, allongée sur le lit, plus par soulagement de me retrouver au chaud et à l’abri. Je pleure sur moi-même, sur ma douleur, sur l’être peureux que je suis devenue. J’ai peur de la nuit, j’ai peur de ma ville, j’ai peur de moi-même. J’étais un oiseau de nuit qui passait son temps à errer, courir et fréquenter les endroits nocturnes de la ville et je comprends que cette période est révolue.  Je me lève du lit et je regarde le ballet des voitures autour de la place d’Italie par la fenêtre de la chambre. Je viens de me rendre compte que je suis devenue allergique à la nuit. Je ne pourrai plus sortir toute seule. Désormais je sortirai dans la journée et dès que la lumière se couchera à l’horizon je rentrerai chez moi pour me réfugier. Pour la première fois de ma vie, je vais attendre l’été avec impatience. Je serai heureuse que les jours rallongent.  Je vais devoir déménager aussi, je ne pourrai plus habiter une petite rue mal éclairée. Je vais désormais résider sur un boulevard ou une avenue très fréquentée et très bruyante. Je me fais couler un bain où je reste une bonne heure. Je ne veux pas dormir, je veux que le jour se lève. Je prends une douche pour finir de bien me nettoyer car un bain ça ne lave pas vraiment. Je décide que j’irai à la piscine tous les jours, pour décaper au chlore la surface de ma peau. Je m’allonge sur le lit et je pleure. Chaque larme est un coup de poignard, je culpabilise. Je suis trop conne, je délire, je suis devenue folle et je suis peut-être même enceinte. Il faudrait que j’appelle mon travail pour donner ma démission. Les flics ou l’hôpital les ont prévenus je crois. Je suis en arrêt de travail pour plusieurs semaines. De toute façon, je ne pourrais plus jamais retourner dans la société pour laquelle je travaille, ça va se savoir ce qui m’est arrivé, tout le monde va me regarder comme une bête curieuse et tout le monde va me plaindre. Ce sera insupportable. C’est une bonne décision d’ailleurs, je gagnais pas mal d’argent mais j’étais entourée de crétins et ce boulot devenait insupportable. Je m’allonge sur le lit et je ferme les yeux. Je m’endors en me disant que demain sera pire qu’aujourd’hui.   Dans son appartement du 106 de la rue des pyrénées, l'homme se dit qu'il devrait tout effacer. Oublier l'écriture. L'oublier enfin.

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