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1 rue des pyrénées

Publié le par drink 75

Un homme ouvre une boîte en carton qui est posé à même le sol. Voici ce qu'il reste de son appartement  ou il a vécu toutes ces années au 1 rue des pyrénées : une boîte. La vie est à l'image du reste : un souvenir indistinct, quelques photos, quelques échos du passé. L'appartement est vide, il sera vendu demain, il signera un papier qui lui annoncera qu'il touche une fortune et une fois qu'il aura payé ses dettes, il n'en restera quasiment rien. Marrant comme tous ces gens qui vous bassinent avec les sentiments de lutte, de fraternité, de communauté, disparaissent quand les problèmes arrivent. D'un mouvement collectif, il ne lui reste que les dettes. Il est temps de partir, loin, très loin, d'aller se faire voir ailleurs, vers le néant. Au 1 rue des pyrénées, un homme lit le quatrième de couverture du dernier emily st john mandel qui vient de paraître et qu'il vient d'acheter. Il relit ce qui est écrit au dos du livre et se demande qui a eu l'idée d'écrire cela. Il se demande si françois guérif aurait laissé écrire cela du temps ou il dirigeait rivages. Il se réjouit de lire ce livre, emily st john mandel est l'écrivaine la plus surprenante qui soit. Ces livres  parlent de fuite, d'errance, de disparition mais ils sont indéfinissables en réalité. Ils sont publiés chez rivages-noirs mais ce ne sont pas réellement des polars. C'est l'écrivaine de la disparition. Non c'est l'écrivaine de la fuite. C'est l'écrivaine du brouillard. Dans son appartement du troisième étage du 1 rue des pyrénées, l'homme se demande quel esprit malade a pu écrire la dernière phrase du quatrième de couverture. Et pour quelle raison ? Pour quelles raisons ? Dans son appartement, du rez de chaussée du 1 rue des pyrénées, la jeune fille essaie de réciter du shakespeare. Elle aurait du inviter le copain avec lequel elle va présenter le conservatoire. Elle l'imagine. il veut présenter une scène d'henry VI, "asseyons-nous à terre et disons la triste histoire de la mort des rois.". Pour elle ce sera tchekov. A moins quelle arrive a adapter Alexievitch. Reprendre les extraits des témoignages des femmes des morts de tchernobyl. Pourrait-elle présenter ce texte, et ne pas pleurer en pensant a sa mère, a sa grand-mère, a son grand-père, en pensant a tous ces gens morts. Elle, née 10 ans après la catastrophe et qui souffre de la tyroïde, elle, une enfant de ghomel. Dans son appartement vide, l'homme regarde quelques photos dans une boîte. Cette photo dans le restaurant, c'est le soir ou il a posé son front sur celle qui gémissait de douleur et ou ils ont appelés sos médecins. Le restaurant a fermé depuis.  Une autre photo. Un mouvement collectif. Sans doute de gauche. C'est marrant, il vient d'acheter charlie hebdo, un hors série sur nouveaux curetons de la pensée. Tout à fait ça. S'ils pouvaient tous se décoloniser le trou de balle, ça leur ferait tellement du bien. La gauche n'est même plus capable de soutenir une jeune fille de 16 ans harcelée car lesbienne et qui ne pplus aleut ler à l'école. Nous en étions là. La gacuhe trouvait normale que des gens vivent sous protection policière depuis 10 ans pour des dessins. C'était quand que ça avait merdé ? Il fallait relire Manchette. Qu'est ce qu'il écrivait il y a plus de 45 ans ? "on ne fait pas meilleur flic qu'un mec d'extrême-gauche". La pertinence des écrits de manchette et pasolini qui dataient d'un demi-siècle ne cessait de le  surprendre. Dans son appartement, l'homme retourne le livre d'emily st john mandel. Après celui-ci relire les 4 précèdents ne seraient pas du luxe. C'était comme lire 5 livres de 5 auteurs différents. Il enclenche sur la platine le dernier album de drive blind, et c'est dingue la modernité du disque plus de 20 ans après sa parution. Dire que ce groupe a explosé pour une histoire de cul. Il en a même fait une nouvelle. Récemment, il a revu "rectify" une des plus grandes séries qui soit, avec "the affair"  et il se souvient qu'il trouvait que l'actrice lui rappelait quelqu'un. Un peu carey mulligan. En fait, l'actrice est un mix entre carey mulligan et emily st john mandel. Cette phrase en quatriéme couverture du dernier emily st john mandel. Qui avait pensé que ça avait un intérêt : "Ce livre fait partie de la liste des 19 livres préferés de barack obama en 2020". Avec son accent assez léger, qu'elle a perdue au fil de sa scolarité en france, la jeune fille récite des vers de shakespeare, comme pour s'échauffer. "J'habille ma vilénie toute nue avec de vieux versets volés au livre sacré...". Elle aime beaucoup les rôles masculins chez shakespeare. Et si elle présentait une scène de richard III en jouant le rôle masculin ? Elle a envie de folie, de théatre, de courses échevelée. Ici en france, c'est un peu compliqué, les gens ont du mal si la vie devient difficile, les acteurs veulent tous devenir des fonctionnaires de la comédie, c'est un peu étonnant. Bien sur elle vit dans 12 métres carrés, elle bosse au mac do, elle sort au restaurant avec des hommes âgés pour survivre, mais elle joue, elle est actrice. Elle, l'enfant de tchernobyl, elle se sent vivante sur une scène de théatre. Elle a parfois l'impression d'être en décalage avec tous ces gens qui font du théatre pour faire un truc et passer le temps. Mais qui ne sont pas prêts a tout sacrifier...L'homme quitte l'appartement vide, il descend une dernière fois l'escalier, et il dépose le carton dans le coffre de sa voiture. Il quitte la rue des pyrénées, il quitte Belleville, il quitte Ménilmontant, il quitte le vingtière arrondissement de paris, il quitte Paris, il quitte le monde de bruit et de fureur. Il va se réfugier loin de tout ce tumulte, il va se confiner en lui-même, oublier le monde, oublier la vie, et attendre qu'il ne se passe rien. Il y a une expression mexicaine "Aqui se rompid una taza" qui veut dire qu'en gros la fête est finie. Il s'installe au volant de voiture et se dit, qu'effectivement, la fête est finie

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