303-301 rue des Pyrénées
Serge range ses affaires dans le placard de sa chambre du centre éducatif du 303 rue des Pyrénées. Il va bientôt en partir. Il a presque 12 ans, il est le plus vieux ici. Ils vont le mettre ailleurs, il sait bien qu'il ne retournera jamais vivre avec sa mère. Elle n'est déjà pas capable de s'occuper d'elle-même. La femme de son oncle lui a dit une fois, qu'il avait échappé de peu a la mort, quand on l'avait découvert, petit. Au milieu des détritus. Il n'en veut pas a sa mère, l'assistante sociale lui a dit une fois qu'il est aussi mature qu'elle est immature. Il parle parfois ici avec les petits qui arrivent, ceux de 6 ans. Depuis le temps qu'il est là. L’expérience. Il a reçu une lettre de son père l'autre jour, une carte postale qui venait du nord de la France, il disait qu'il travaillait sur un chantier. Ça semblait vrai. En règle général quand son père lui écrit c'est qu'il est en prison. Il raconte qu'il voyage, mais il est juste en taule. Ici c'est courant. Il y a cette fille, Elise, dont la père est en prison parce qu'il a tué sa mère. Elle sera peut-être adopté. Elle dit qu'elle ne veut jamais revoir son père. Il parait qu'elle pleure souvent la nuit. C'est caroline qui lui a dit ça. Caro va bientôt partir elle aussi, dans un centre pour adolescents entre 13 et 16 ans. Elle ne peut pas aller en famille d'accueil. Un trop lourd bagage psychologique lui a dit le médecin, Caroline c'est un cas un peu lourd, il l'aime bien, mais elle est un peu ravagée. C'est glauque son histoire. Violée par toute sa famille. Elle lui a un peu raconté. Parmi la soixantaine de jeunes qui vivent ici, il est le seul a savoir. Il vient de passer vingt minutes dans le parc avec Faudil, depuis quelques jours il a appris la mort d'un de ses frères et il semble perturbé. C'est celui dont il disait qu'il allait venir le chercher et qu'ils partiraient tout les deux pour vivre au bord de la mer. Il est retourné un peu chez lui. Faudil ne parle jamais de sa famille, il parle toujours de son frère. Et celui-ci est maintenant mort. Il semble perdu. Serge avait rendez-vous avec une éducatrice le matin, elle lui a dit qu''elle aimait bien son prénom. Je m'appelle comme ça parce que mes parents m'ont conçu sur je t'aime moi non plus il lui a expliqué. Ma mère dit toujours que j'ai de la chance d'être un garçon, si j'avais été une fille je me serais appelé Brigitte. L'éducatrice n'a pas moufté alors qu'il s'est mis a rire. Serge range ses affaires, demain il doit rencontrer la juge aux affaires familiales, il l'aime bien, elle ne lui parle pas comme a un débile, ça change de ses parents. C'est parce qu'elle n'a pas peur de lui. Ses parents ne comprennent pas ce que c'est d'être parent, d'avoir un enfant, ses parents sont deux largués de la vie qui pensaient que un plus un faisait deux. Il ne leur en veut pas. Mais il doit passer son chemin. S'il veut s'en sortir, il doit passer son chemin.